Voici le premier défi : « Satan répondit à l'Éternel : Est-ce d'une
manière désintéressée (non égoïste) que Job craint Dieu? » Satan met à
la fois en doute les motifs de Job et l'impartialité de Dieu (
Job 1.9
). C'est une attaque intelligente à laquelle le Créateur et Job à son
insu ne peuvent manquer de répondre d'une manière pratique : Dieu lui
livre tout ce qui appartient à Job. En résumé, Dieu doit cesser de
bénir Job pour démontrer l'impartialité divine alors que Job doit
montrer le mobile qui l'anime. Il serait aisé de dire que c'est Job
qui souffrira le plus dans cette affaire, mais c'est bien mal
connaître Dieu qui ressent de manière aiguë toutes les peines et les
douleurs de Ses créatures. « Il a pris nos infirmités, et il s'est
chargé de nos maladies. » (
Matthieu 8.17 )
Le résultat est d'abord magnifique : « En tout cela, Job ne pécha
point et n'attribua rien d'injuste à Dieu. » (
Job 1.22
) Cela pourrait peut-être aussi se traduire : « En tout cela, Job ne
pécha point en n'attribuant rien d'injuste à Dieu ». Le péché se
définit alors comme l'attribution de l'injustice à Dieu, l'attribution
de l'oeuvre de Satan (l'injustice) à Dieu. Ce péché peut être
pardonné, contrairement au péché contre le Saint-Esprit qui consiste à
attribuer l'oeuvre de Dieu à Satan et ferme ainsi la porte à toute
intervention divine. C'est en fait le péché d'incrédulité, le seul
péché qui mène à la mort (
1 Jean 5.16-17
). Il ne peut être pardonné parce que le pécheur refuse délibérément,
volontairement et avec insistance l'oeuvre de Dieu en lui, croyant
qu'elle vient de Satan. Il ferme toutes les avenues par lesquelles
Dieu peut le toucher. C'est le seul péché qui mène à la mort (
1 Jean 5.16
) et c'est donc l'arme par excellence de Satan, lui qui a été
« meurtrier dès le commencement », celui qui a causé la mort
spirituelle de l'humanité.
Tous les péchés, passés, présents et futurs ont été couverts par le
sang de Christ et ont été pardonnés à la croix. « Il a effacé l'acte
dont les ordonnances nous condamnaient et qui subsistait contre nous,
et il l'a détruit en le clouant à la croix. » (
Colossiens 2.14
). L'acte d'accusation ayant été effacé par la croix, l'acquittement
de l'homme est prononcé.
« Car si, lorsque nous étions ennemis, nous avons été réconciliés avec
Dieu par la mort de son Fils, à plus forte raison, étant réconciliés,
serons-nous sauvés par sa vie. » (
Romains 5.10 )
« Car Dieu était en Christ, réconciliant le monde avec lui-même, en
n'imputant point aux hommes leurs offenses, et il a mis en nous la
parole de la réconciliation. Nous faisons donc les fonctions
d'ambassadeurs pour Christ, comme si Dieu exhortait par nous; nous
vous en supplions au nom de Christ : Soyez réconciliés avec Dieu! (
2 Corinthiens 5.19-20 )
Ces deux textes distinguent nettement l'oeuvre de Dieu et la part de
l'homme. Ainsi un refus délibéré de reconnaître l'oeuvre de Dieu au
profit de celle de l'homme est l'inverse de la foi et constitue
l'incrédulité. L'incrédule ne reconnaît rien, il n'attend rien et il
n'obtient donc rien. Il ose d'abord négliger, puis résister, ensuite
repousser et en vient finalement à combattre l'oeuvre du communicateur
de la grâce divine obtenue gratuitement en et par Jésus-Christ,
c'est-à-dire l'oeuvre du Saint-Esprit.
Le second défi est donné dans
Job aux versets 2.4-5.
« L'Éternel dit à Satan : D'où viens-tu? Et Satan répondit à l'Éternel
: De parcourir la terre et de m'y promener. L'Éternel dit à Satan :
As-tu remarqué mon serviteur Job? Il n'y a personne comme lui sur la
terre; c'est un homme intègre et droit, craignant Dieu, et se
détournant du mal. Il demeure ferme dans son intégrité, et tu
m'excites à le perdre sans motif. Et Satan répondit à l'Éternel : Peau
pour peau! tout ce que possède un homme, il le donne pour sa vie. Mais
étends ta main, touche à ses os et à sa chair, et je suis sûr qu'il te
maudit en face. »
Ce défi touche la personne même de Job alors que le premier touchait
seulement à ce qui lui appartenait. Pour y arriver, il utilise la
personne qu'il aime probablement le plus sur terre, sa femme :
« Maudis Dieu, et meurs! » Assez étrangement, l'original dirait plutôt
: « Bénis Dieu, et meurs! » C'est là le seul endroit où ce mot est
traduit « maudis » plutôt que « bénis ». Il se peut que ce soit là une
pointe d'ironie ou de sarcasme. Mais l'attaque est beaucoup plus
profonde et vicieuse : elle affirme que bénir Dieu n'apporte rien
sinon du mal. « Bénis Dieu et meurs! » C'est l'accusation massue de
l'Adversaire : Dieu est l'Auteur du mal. Quelle audace!
L'épouse de Job n'a pas le courage ni la foi de son mari. Elle n'est
pas prête à souffrir avec lui. Il n'est pas dit qu'elle meurt. Elle
semble plutôt l'avoir abandonné et avoir cédé devant l'attaque de
l'ennemi. Elle nous laisse cependant ce témoignage de l'intégrité de
Job (
Job 1.9
). Par ailleurs, il nous est dit que les derniers temps seront
témoins du bris de bien des unions. L'un sera pris et l'autre laissé.
C'est ce qui se passe ici, dans ce microcosme de la fin des temps,
dans cette préfiguration de l'Église de Laodicée où le taux de divorce
se compare à celui du monde en général. Enfin l'Église de Christ
a-t-elle le courage et la foi de vivre avec Lui et de souffrir avec
Lui? Le test vient bientôt. Elle sera peu nombreuse, un reste
seulement. Serons-nous du nombre? Possédons-nous le renoncement aimant
de Christ?
Comment réagit Job?
« En tout cela Job ne pécha point par ses lèvres. » (
Job 2.10 )
Cela signifie-t-il que Job aurait péché dans son coeur? Car nous
savons que le péché commence bien avant l'action, au coeur même de la
pensée (
Jacques 1.14
). Pourquoi cette expression? C'est que sa femme le défie de maudire
Dieu, de Le blasphémer. Mais Job se tait et le fait qu'il ne dise rien
est tout à l'honneur de Dieu. Il ne parle point contre Dieu. Il passe
le second test.
Job s'en sort bien jusqu'ici. Mais va-t-il réussir à tenir le coup
devant la prochaine attaque savamment élaborée et excessivement
subtile de Satan, prélude à celle de Christ qui Se verra abandonné de
tous et, en apparence, de Dieu, portant le poids des péchés du monde
entier, alors que Job ne porte ici que les siens et en partie
seulement? Car Job procède alors à une révision en profondeur de sa
vie, ses « pensées s'accusant ou se défendant tour à tour » sous
l'action de sa conscience. Job voit ici un échantillon de ce que sera
la seconde mort, la séparation éternelle de Dieu. Jésus devra
intervenir pour la vivre à sa place. Il ne peut tolérer que son
serviteur la vive car Il a fait une promesse à nos pères.