1 : « Quand il ouvrit le septième sceau, il y eut dans le ciel
un silence d’environ une demi-heure ».
Le premier verset de ce chapitre est en relation avec les événements
mentionnés dans les chapitres antérieurs, et il ne devrait donc pas
être séparé d’eux par la division du chapitre. Ici, la série des sept
sceaux recommence et se termine. Le sixième chapitre de l’Apocalypse
prend fin avec l’exposition des événements du sixième sceau, et le
huitième chapitre commence avec l’ouverture du septième sceau. Le
septième chapitre représente donc une parenthèse entre le sixième et
le septième sceau, et il est évident que le scellement d’Apocalypse
sept appartient au sixième sceau.
Le silence dans le ciel.
Le sixième sceau ne nous amène pas jusqu’à la seconde venue de Christ,
bien qu’il embrasse des événements étroitement liés à cette venue. Il
présente les épouvantables commotions des éléments, où le ciel se
retire comme un livre qu’on roule, la surface de la terre se fend, et
les impies confessent que le grand jour de la colère de Dieu est
arrivé. Ils se trouvent dans l’expectative de voir le Roi apparaître
en gloire. Mais le sceau n’arrive pas jusqu’à cet événement.
L’apparition personnelle de Christ doit donc arriver durant le sceau
suivant.
Quand le Seigneur apparaît, il vient avec tous les saints anges (
Matthieu 25:31
). Quand tous les joueurs de harpes célestes abandonnent les cours de
Dieu pour venir sur cette terre avec leur divin Seigneur tandis qu’il
descend chercher les fruits de son oeuvre rédemptrice, n’y aura-t-il
pas le silence dans le ciel? Cette période de silence, si nous la
considérons comme un temps prophétique, dure environ sept jours.
2 : « Et je vis les sept anges qui se tiennent devant Dieu, et
sept trompettes leur furent données. »
Ce verset présente une série nouvelle et distincte d’événements. Avec
les sceaux, nous avons l’histoire de l’Église durant ce que nous
appelons l’ère chrétienne. Avec les sept trompettes que nous abordons
maintenant nous avons les principaux événements politiques et
belliqueux qui se produisent pendant le même temps.
3-5 : «
3 Et un autre ange vint, et il se tint sur
l’autel, ayant un encensoir d’or; on lui donna beaucoup de parfums,
afin qu’il les offrît, avec les prières de tous les saints, sur
l’autel d’or qui est devant le trône.
4 La fumée des parfums
monta, avec les prières des saints, de la main de l’ange devant Dieu.
5 Et l’ange prit l’encensoir, le remplit du feu de l’autel, et
le jeta sur la terre. Et il y eut des voix, des tonnerres, des
éclairs, et un tremblement de terre. »
Après avoir présenté les sept anges de la scène du verset 2, Jean
attire, pour un moment, notre attention sur une séquence totalement
différente. L’ange qui s’approche de l’autel n’est pas un des sept qui
reçoivent les trompettes. L’autel est celui des parfums, qui dans le
sanctuaire terrestre se trouvait dans le premier appartement. Nous
trouvons donc, ici, une autre preuve de l’existence d’un sanctuaire
dans le ciel, avec ses ustensiles pour le service. Il était l’original
duquel le terrestre était une image; et les visions de Jean nous
conduisent à l’intérieur de ce sanctuaire céleste. À l’intérieur, nous
voyons la réalisation d’une oeuvre en faveur de tous les saints. On
nous présente ici, sans aucun doute, toute l’oeuvre de médiation qui
est accomplie en faveur du peuple de Dieu pendant l’ère évangélique.
Ceci ressort par le fait que l’ange offre de l’encens avec les prières
de tous les saints. Le fait que l’ange remplit son encensoir de feu et
le jette sur la terre met en évidence que cette vision nous conduit à
la fin du temps, et par cet acte, il indique que son oeuvre est
terminée. Déjà, des prières mêlées d’encens ne doivent plus être
offertes. Cet acte symbolique ne peut s’appliquer qu’au moment où le
ministère de Christ dans le sanctuaire en faveur de l’humanité prend
fin pour toujours. Après cet acte de l’ange, il y a des voix, des
tonnerres, des éclairs, et des tremblements de terre; selon ce qui
nous est dit ailleurs, c’est exactement ce qui doit arriver à la fin
du temps de grâce de l’humanité (Voir
Apocalypse 11 :19;
16 :17,18 ).
Mais pourquoi ces versets sont-ils insérés ici? Ils constituent un
message d’espérance et de consolation pour l’Église. Les sept anges
avec leurs trompettes belliqueuses ont été présentés; des scènes
terribles vont se produire lorsqu’ils sonneront de la trompette; mais
avant de commencer à sonner, l’oeuvre de médiation qui est accomplie
dans le ciel en faveur du peuple de Dieu, lui est montrée, et il est
invité à contempler ce qui sera la source de sa force et son aide
pendant cette période. Bien qu’il sera jeté dans les vagues
tumultueuses de la guerre et des altercations, il doit se souvenir que
son grand Souverain Sacrificateur continue à officier pour lui dans le
sanctuaire céleste. Il pourra diriger ses prières vers ce lieu sacré
avec la sécurité qu’elles seront offertes avec l’encens à leur Père
céleste. Il pourra ainsi obtenir la force et le soutien durant toute
la persécution.
6 : « Et les sept anges qui avaient les sept trompettes se
préparèrent à en sonner. »
Les sept trompettes.
Reprenons en considération les sept trompettes, qui occuperont le
reste de ce chapitre et tout le chapitre neuf. Le symbole des
trompettes sonnées par les sept anges complète ce qu’annonçait la
prophétie de
Daniel 2 et
7
après la division du vieil empire romain en dix royaumes. Dans les
quatre premières trompettes, nous avons une description des événements
spéciaux qui signalèrent la chute de Rome.
7 : « Et il y eu de la grêle et du feu mêlés de sang, qui
furent jetés sur la terre; et le tiers de la terre fut brûlé, et le
tiers des arbres fut brûlé, et toute herbe verte fut brûlée. »
Alexander Keith a remarqué avec justesse ce qui suit :
« Personne ne pouvait mieux éclaircir les textes, ou les exposer plus
complètement, que l’historien Gibbon ne l’a fait dans ce travail. Les
chapitres du philosophe sceptique qui traitent directement du sujet,
ont seulement besoin qu’on les procède d’un texte et qu’on efface
quelques paroles profanes, pour former une série d’exposition des
chapitres 8 et
9
de l’Apocalypse de Jésus-Christ. » « Il ne reste que peu, ou rien à
faire, à celui qui prétend les interpréter, si ce n’est de signaler
les pages de Gibbon. »
Le premier châtiment grave qui tomba sur la Rome Occidentale dans son
déclin, fut la guerre avec les Goths commandés par Alaric, qui prépara
le chemin à d’autres incursions. La mort de l’empereur romain Théodose
eut lieu en Janvier 395, et avant la fin de l’hiver, les Goths dirigés
par Alaric, guerroyaient contre l’empire.
La première invasion que conduisit Alaric dévasta l’empire oriental.
Il prit les villes fameuses et réduisit beaucoup de leurs habitants à
l’esclavage. Il conquit les régions de la Thrace, de la Macédoine,
l’Attique et le Péloponnèse, mais il n’arriva pas jusqu’à la ville de
Rome. Plus tard, le chef Goth traversa les Alpes et les Apennins et se
présenta devant les murs de la Ville Éternelle, qui fut prise par les
barbares en 410.
« La grêle et du feu mêlés de sang » furent jetés sur la terre. Les
terribles effets de l’invasion des Goths nous sont présentés sous ceux
de « la grêle », vue l’origine septentrionale des envahisseurs; sous
ceux « du feu » à cause de la destruction des villes et des champs par
les flammes; et sous ceux du « sang » à cause des terribles tueries
des habitants de l’empire que ces guerriers intrépides et audacieux
commirent.
La première trompette.
Le coup de la première trompette se situe vers la fin du quatrième
siècle et suivant, et concerne les invasions dévastatrices que les
Goths firent subir à l’empire romain.
Après s’être bien étendu sur l’oeuvre d’Edward Gibbon, « History of
the Decline of the Roman Empire » (Histoire de la décadence et de la
chute de l’Empire Romain), chapitres 30 à 33, relatifs aux conquêtes
des Goths, Alexander Keith présente un résumé admirable des paroles de
l’historien qui souligne l’accomplissement de la prophétie :
« Les larges extraits démontrent clairement comment Gibbon exposa bien
et amplement ce passage de l’histoire de la première trompette, la
première tempête qui s’abattit sur la terre romaine, et la première
chute de Rome. Utilisant ses mots comme un commentaire plus direct,
nous lisons ainsi la totalité du sujet : La nation des Goths était en
armes quand on entendit le premier son de la trompette, et malgré
l’inhabituelle sévérité de l’hiver, ils firent rouler leurs pesants
chariots dans le lit large et gelé du fleuve. Les champs fertiles de
Phocide et de Béotie furent couverts par un déluge de barbares; les
hommes furent massacrés, les femmes et le bétail des villages en
flammes furent chassés. Les marques profondes et sanglantes des Goths
pouvaient facilement se discerner plusieurs années après. Tout le
territoire de l’Attique fut dévasté par la funeste présence d’Alaric.
Les plus chanceux des habitants de Corinthe, d’Argos et de Sparte
échappèrent à la mort mais ils contemplèrent la destruction de leurs
villes. Durant cette saison de grande chaleur où le lit des fleuves
s’asséchèrent, Alaric envahit les territoires d’Occident. Le
« vieillard solitaire de Vérone » (le poète Claudien) se lamenta
pathétiquement sur le sort des arbres de son époque, qui brûlèrent
dans la conflagration de tout le pays [notez les paroles de la
prophétie : ‘Le tiers des arbres fut brûlé’]; et l’empereur des
Romains prit la fuite devant le roi des Goths.
« Une furieuse tempête se leva parmi les nations de Germanie; depuis
l’extrême nord, les barbares marchèrent presque jusqu’aux portes de
Rome. Ils réussirent à détruire l’Occident. Le nuage sombre qui
s’était formé tout au long des côtes de la Baltique, éclata
accompagné de coups de tonnerre, sur les rives du Haut Danube. Les
prairies de la Gaule, où paissaient les troupeaux, et les rives du
Rhin couvertes d’élégantes maisons et de propriétés bien cultivées,
formaient un panorama de paix et d’abondance, qui se transforma
soudainement en un désert, qui se distinguait de la solitude de la
nature uniquement par les ruines fumantes. Beaucoup de villes furent
cruellement opprimées ou détruites. Plusieurs milliers furent mis à
mort de façon inhumaine. Les flammes consumantes de la guerre
s’étendirent sur la plus grande partie des dix-sept provinces de la
Gaule.
« Ensuite, Alaric étendit ses ravages à l’Italie. Durant quatre ans,
les Goths pillèrent et régnèrent sans contrôle. Et pendant le sac et
l’incendie de Rome, les rues de la ville se remplirent de cadavres;
les flammes consumèrent beaucoup d’édifices publics et particuliers;
et les ruines d’un palais subsistèrent encore un siècle et demi plus
tard comme monument grandiose de la guerre des Goths. »
Après ce résumé, Keith complète le tableau en disant :
« La phase finale du chapitre 33 de l’histoire de Gibbon est en elle
même un commentaire clair et compréhensif; parce qu’en concluant sa
propre description de cette période brève mais riche en événements, il
concentre, comme des déclarations parallèles, la totalité de l’histoire
et la substance de la prédiction. Mais les mots qui précèdent ces
déclarations ne manquent pas de signification : ‘La dévotion publique
de cette époque était impatiente d’exalter les saints et les martyres
de l’église catholique, sur les autels de Diane et d’Hercule. L’union
de l’empire romain fut dissoute; son génie humilié dans la poussière;
et des armées de barbares inconnus, sortirent des régions glacées du
Nord, établirent leur règne victorieux sur les provinces les plus
belles d’Europe et d’Afrique.
« Le dernier mot, Afrique, est le signal pour la sonnerie de la
deuxième trompette de sonner. La scène se transporte des rives de la
Baltique à la côte méridionale de la Méditerranée, ou des régions
glacées du nord aux plages brûlantes d’Afrique. Et au lieu d’une
tempête de grêle qui s’abat sur la terre, une « montagne embrasée par
le feu fut jetée dans la mer. »
8, 9 : «
8 Le second ange sonna de la trompette. Et
quelque chose comme une grande montagne embrasée par le feu fut jeté
dans la mer; et le tiers de la mer devint du sang,
9 et le
tiers des créatures qui étaient dans la mer et qui avaient vie mourut,
et le tiers des navires périt. »
La seconde trompette.
L’empire romain, après Constantin le Grand, se divisa en trois
parties. D’où la mention fréquente du « tiers des hommes », allusion à
la troisième partie de l’empire qui souffre du fléau. Cette division
de l’empire Romain se fit à la mort de Constantin le Grand, par ses
trois fils : Constance, Constantin II et Constant. Constance eut
l’Orient et fixa sa résidence à Constantinople, la métropole de
l’empire. Constantin II obtint la Grande Bretagne, la Gaule et
l’Espagne. Constant régna sur l'Illyrie, l’Afrique et l’Italie.
Le son de la seconde trompette se réfère évidemment à l’invasion et à
la conquête de l’Afrique, et plus tard de l’Italie, par Genséric,
roi des Vandales. Ses conquêtes furent surtout navales, et ses
triomphent furent « comme une grande montagne embrasée par le feu,...
jetée dans la mer. » Quelle image pouvait mieux illustrer
l’affrontement des flottes ou la destruction générale causée par la
guerre sur les côtes maritimes? Pour expliquer cette trompette, nous
avons besoin de chercher des événements qui eurent une influence sur
le monde commercial. Le symbole utilisé ici nous pousse naturellement
à chercher une agitation ou un bouleversement. Rien qui ne soit pas
une féroce guerre navale ne peut accomplir la prédiction. Si le son
des quatre premières trompettes se réfère à quatre événements
remarquables qui contribuèrent à la chute de l’empire romain, et si la
première trompette prédit les désastres commis par les Goths sous
Alaric, dans l’étude de la seconde trompette, nous chercherons
naturellement l’invasion suivante qui secoua le pouvoir romain et
prépara sa chute. La grande invasion suivante fut celle de Genséric,
à la tête des Vandales. Sa course arriva à son apogée entre les années
428-468. Ce grand chef vandale établit son quartier général en Afrique.
Mais comme dit Gibbon, « la découverte et la conquête des nations
noires [en Afrique] qui pouvaient vivre dans la zone torride, ne tenta
pas l’ambition rationnelle de Genséric; aussi dirigea-t-il ses regards
vers la mer; il résolut de créer une force navale, et exécuta sa
décision audacieuse avec une persévérance active et constante. »
Depuis le port de Carthage, il sortit à plusieurs reprises, comme
pirate, pour enlever des proies au commerce romain et faire la guerre
à l’empire. Pour faire face à ce monarque de la mer, l’empereur
Majorien, fit d’intenses préparatifs navals.
« Les forêts des Apennins furent taillées; les arsenaux furent
rétablis et les fabriques de Ravenne et Misène restaurées; l’Italie et
la Gaule rivalisèrent pour faire de généreuses contributions au
service public; et la marine impériale de trois cents grandes galères,
avec une proportion adéquate de transports et de navires plus petits,
se réunit dans le port sûr et spacieux de Carthagène en Espagne...
Mais Genséric se sauva de la ruine imminente et inévitable par la
trahison de quelques-uns des sujets puissants, qui l’enviaient ou qui
craignaient le succès de leur seigneur. Guidé par leurs renseignements
secrets, il surprit la flotte sans surveillance dans la baie de
Carthagène; de nombreux bateaux furent coulés, capturés ou brûlés; et
les préparatifs de trois années furent anéantis en un seul jour...
« Le royaume d’Italie, nom auquel avait été graduellement réduit
l’empire d’Occident fut affligé pendant le gouvernement de Ricimer,
par les déprédations incessantes des pirates vandales. Au printemps de
chaque année, ils équipaient une flotte formidable dans le port de
Carthage; et Genséric, bien que déjà vieux, commandait toujours en
personne les expéditions les plus importantes...
» Les Vandales visitèrent plusieurs fois les côtes d’Espagne, de
Ligurie, de Toscane, de Campanie, de Lucanie, Bruttium, Apulie,
Calabre, Vénétie, Dalmatie, Épire, Grèce et Sicile...
» La célérité de leurs mouvements, leur permettait de menacer et
d'attaquer les objectifs les plus éloignés qui attiraient leurs
désirs; et comme ils embarquaient toujours un nombre suffisant de
chevaux, ils pouvaient parcourir, à peine débarqués, la région
atterrée avec un corps de cavalerie légère. »
Une dernière tentative désespérée de dépouiller Genséric de la
souveraineté de la mer fut faite en 468 par Léon I, empereur d’Orient.
Gibbon l’atteste ainsi :
« Le coût total de la campagne africaine, quels que soient les moyens
de la financer, atteignit la somme de 130 000 livres d’or, quelques
5 200 000 livres sterling... La flotte qui sortit de Constantinople
pour Carthage comptait 1 113 bateaux, et le nombre de soldats et de
marins excédait les 100 000 hommes... L’armée d’Héraclius et la flotte
de Marcellinus s’unirent ou secondèrent le lieutenant impérial... Le
vent favorisa les desseins de Genséric. Il fit manoeuvrer ses plus
grands navires de guerre par les Maures et les Vandales les plus
vaillants, et ils remorquèrent à leur suite beaucoup de petites
embarcations pleines de matériaux combustibles. Dans l’obscurité de la
nuit, ces navires destructeurs furent poussés contre la flotte
romaine, qui n’était pas sur ses gardes et qui ne soupçonnait rien,
mais ils comprirent tout de suite le danger. Leur disposition fermée
et encombrée facilita la progression du feu, qui se communiqua avec
une violence rapide et irrésistible; et le bruit du vent, le
crépitement des flammes, les cris discordants des soldats et des
marins, qui ne pouvaient ni donner des ordres ni obéir, augmentaient
l’horreur du tumulte nocturne. Tandis qu’ils travaillaient à s‘extirper
des brûlots et sauver au moins une partie de la flotte, les galères de
Genséric les assaillirent avec un courage mesuré et discipliné; et
beaucoup de Romains qui échappèrent à la furie des flammes, furent
tués ou capturés par les Vandales victorieux... Après la défaite de
cette grande expédition, Genséric redevint le tyran de la mer; les
côtes d’Italie, de Grèce et d’Asie furent à nouveau exposées à sa
vengeance et à son avarice; Tripoli et la Sardaigne lui obéirent à
nouveau; il ajouta la Sicile à ses nombreuses provinces; et avant de
mourir, dans la plénitude des années et de la gloire, il contempla
l’extinction finale de l’empire d’Occident. »
Concernant la part importante que cet audacieux corsaire joua dans la
chute de Rome, Gibbon utilise le langage suivant : « Genséric, un nom
qui, dans la destruction de l’empire romain, méritait un rang égal aux
noms d’Alaric et Attila. »
10, 11 : «
10 Le troisième sonna de la trompette. Et il
tomba du ciel une grande étoile ardente comme un flambeau; et elle
tomba sur le tiers des fleuves et sur les sources des eaux.
11
Le nom de cette étoile est Absinthe; et le tiers des eaux furent
changé en absinthe, et beaucoup d’hommes moururent par les eaux, parce
qu’elles étaient devenues amères. »
La troisième trompette.
Par l’interprétation et l’application de ce passage, nous arrivons au
troisième événement important qui a pour résultat la subversion de
l’empire romain. Dans l’exposé de l’accomplissement historique de
cette troisième trompette nous reconnaissons notre dette envers les
notes d’Albert Barnes pour quelques extraits. Comme le dit ce
commentateur, pour expliquer ce passage, il est nécessaire « qu’il y
ait un capitaine ou un guerrier qui puisse se comparer à un météore
ardent; dont la course soit particulièrement brillante; qui apparaisse
soudainement, comme une étoile filante, pour disparaître ensuite comme
une étoile dont la lumière s’éteint dans les eaux; que la course
dévastatrice de ce météore touche de grandes parties du monde où
abondent les sources et les cours d’eau; qu’il se produise un effet
comme si ces rivières et ces fontaines devenaient amères; c’est-à-dire
que beaucoup de personnes meurent, et que les grandes désolations
soient causées par la proximité de ces fleuves et de ces cours d’eaux,
comme si une étoile amère et funeste était tombée dans les eaux, et
que la mort se soit propagée sur les terre adjacentes qu’elles
arrosent. »
En principe, il est admis que cette trompette fait allusion aux
guerres désastreuses et aux invasions furieuses qu’Attila, roi des
Huns, mena contre le pouvoir romain. En parlant de ce guerrier, et
plus particulièrement de son apparence personnelle, Barnes dit :
« Son apparence ressemblait beaucoup à un brillant météore qui
scintille dans le ciel. Il vint d’Orient avec ses Huns, et il les
déversa soudainement sur l’empire, comme nous le verrons, avec la
rapidité d’un météore scintillant. Il se considérait comme consacré à
Mars, le dieu de la guerre, et il avait l’habitude de se parer d’une
façon voyante et singulière, afin que son apparence, en accord avec le
langage de ses adulateurs, suffise à éblouir ceux qui le regardaient. »
En parlant de la localisation des événements prédits par cette
trompette, Barnes a noté :
« On dit surtout, que l’effet allait toucher les ‘fleuves et les
sources d’eau’. Que ceci ait une application littérale, ou si, comme
nous le supposons dans le cas de la seconde trompette, le langage
utilisé se rapporte à la partie de l’empire qui serait
particulièrement affectée par une invasion hostile, alors nous
pouvons supposer qu’il s’agit des régions de l’empire où les cours
d’eau et les sources, et plus particulièrement où naissent les
rivières et les ruisseaux -- car l’effet était permanent sur les
‘sources d’eaux’. En fait, les principales actions d’Attila avaient eu
lieu dans les Alpes, et dans ces parties de l’empire d’où les fleuves
descendent vers l’Italie. Gibbon décrit ainsi de façon générale
l’invasion d’Attila : ‘ Toute la largeur de l’Europe, qui s’étend sur
plus de huit cents kilomètres depuis l’Euxine jusqu’à l’Adriatique,
fut envahie en une seule fois, occupée et dévastée par les myriades de
barbares qu’Attila conduisit dans la campagne.’ »
Le nom de l’étoile est « Absinthe ».
Le mot « absinthe » indique quelque chose aux conséquences amères.
« Ces mots, qui sont en relation étroite avec le verset antérieur,...
nous rappellent ... le caractère d’Attila, la misère dont il fut
l’auteur ou l’instrument et la terreur que son nom inspirait.
» ‘Extirpation totale et anéantissement’ sont les termes qui
définissent le mieux les calamités qu’il infligeait...
» Attila se réjouissait de ce que l’herbe ne repousserait pas là où
son cheval était passé. ‘Le fléau de Dieu’ était le nom qu’il s’était
attribué, et qu’il incluait parmi ses titres royaux. L’empereur
d’occident, le sénat et le peuple de Rome, tentèrent d’apaiser la
colère d’Attila, avec crainte et humilité. Et le dernier paragraphe
des chapitres qui traitent de son histoire, s’intitule ‘symptômes de
la décadence et de la ruine du gouvernement romain.’ Le nom de
l’étoile était Absinthe. »
12 : « Le quatrième sonna de la trompette. Et le tiers du
soleil fut frappé, et le tiers de la lune, et le tiers des étoiles,
afin que le tiers en fût obscurci, et que le jour perdît un tiers de
sa clarté, et la nuit de même. »
La quatrième trompette.
Nous comprenons que cette trompette symbolise la carrière d’Odoacre,
le premier barbare qui gouverna l’Italie et qui fut en relation
étroite avec la chute de la Rome occidentale. Les noms du soleil, de
la lune et des étoiles -- qui sont ici sans aucun doute utilisés
symboliquement -- désignent évidemment les grands luminaires du
gouvernement romain : ses empereurs, ses sénateurs et ses consuls. Le
dernier empereur de la Rome occidentale, fut Romulus, celui qu’on
appelait Augustule par dérision, c’est-à-dire le « petit Auguste ». La
Rome occidentale tomba en 476. Cependant, bien que le soleil romain
s’éteignit, ses luminaires subordonnés brillèrent faiblement pendant
que le sénat et les consuls subsistaient. Mais après de nombreux
revers civils et les changements de fortune politique, à la fin,
toute la forme de l’ancien gouvernement fut bouleversée, et Rome
elle-même, qui était l’impératrice du monde, se vit réduite à la
condition d’un pauvre duché tributaire de l’Exarchat de Ravenne.
L’extinction de l’empire occidental est ainsi décrite par Gibbon :
« L’infortuné Augustule fut l’instrument de sa propre disgrâce : il
présenta sa démission du sénat; et cette assemblée, dans un dernier
acte d’obéissance à un prince romain, affecta encore l’esprit de
liberté et les formes de la constitution. Par décret unanime, il
envoya un décret à l’empereur Zénon, le beau-fils et successeur de
Léon, récemment restauré sur le trône byzantin, après une courte
rébellion. ‘Ils [les sénateurs] nièrent solennellement la nécessité,
ou même le désir de poursuivre plus longtemps la succession impériale
en Italie; car, d’après eux, la majesté d’un seul monarque suffit à
dominer et à protéger l’Orient comme l’Occident. En leurs propres noms
et en celui du peuple, ils consentirent à transférer le siège de
l’empire universel de Rome à Constantinople; et ils renoncèrent
vilement au droit d’élire leur seigneur, seul vestige qui leur restait
encore de l’autorité qui avait donnée les lois au monde.’ »
Alexander Keith commente la chute de Rome de la façon suivante :
« Le pouvoir et la gloire de Rome s’éteignit en tant que dominatrice
de tout autre nation. Seul le nom restait à la reine des nations. Tout
insigne de la royauté disparut de la ville impériale. Celle qui avait
gouverné les nations était assise dans la poussière, comme une seconde
Babylone, et il n’y avait pas de trône où les Césars avaient régné.
Le dernier acte d’obéissance à un prince romain qu’exécuta cette
assemblée autrefois auguste, fut l’acceptation de la démission du
dernier empereur d’Occident, et l’abolition de la succession impériale
en Italie. Le soleil de Rome avait été frappé...
« Un nouveau conquérant de l’Italie, l’Ostrogoth Théodoric, se leva
rapidement, assuma sans aucun scrupule la pourpre royale et régna par
droit de conquête. ‘La royauté de Théodoric fut proclamée par les
Goths ( le 5 Mars 493), avec le consentement tardif, adverse et
ambigu de l’empereur d’Orient’. Le pouvoir impérial romain, duquel
Rome ou Constantinople avait été le siège, conjointement ou
séparément, en Orient ou en Occident, ne fut déjà plus reconnu en
Italie, et la troisième partie du soleil fut frappée au point de ne
plus pouvoir émettre même les plus faibles rayons. Le pouvoir des
Césars n’était déjà plus connu en Italie; et un roi Goth régnait sur
Rome.
« Mais bien que le tiers du soleil fut frappé, et que le pouvoir de
la Rome impérial cessa d’exister dans la ville des Césars, la lune et
les étoiles continuèrent à briller pour un peu de temps encore dans la
partie [impériale] occidentale, même au milieu des ténèbres Gothes. Le
consul et le sénat [la lune et les étoiles] ne furent pas abolis par
Théodoric. ‘Un historien Goth applaudit le consulat de Théodoric comme
l’apogée de tout pouvoir et de toute grandeur temporels’, telle la
lune qui règne la nuit, après le coucher du soleil. Et au lieu
d’abolir cette charge, Théodoric lui-même ‘félicita ces favoris
annuels de la fortune qui, sans les soins du trône, jouissaient de sa
splendeur.’
« Mais, selon la prophétie, le consulat et le sénat de Rome arrivèrent
à leur fin, bien qu’ils ne tombèrent pas par les mains des Vandales ni
des Goths. La révolution suivante que souffrit l’Italie fut sa
soumission à Bélisaire, le général de Justinien, empereur de l’Orient.
Il ne pardonna pas ce que les barbares avaient consacré. ‘Le consulat
romain anéanti par Justinien en 541’ est le titre du dernier
paragraphe du chapitre 40 de l’histoire de la décadence et de la chute
de Rome, par Gibbon. ‘La succession des consuls cessa finalement la
treizième année de Justinien, dont le tempérament despotique pouvait
apprécier l’extinction silencieuse d’un titre qui rappelait aux
Romains leur ancienne liberté.’ ‘Le tiers du soleil fut frappé, et le
tiers de la lune, et le tiers des étoiles’. Dans le firmament
politique du monde antique, tandis que le royaume de la Rome impériale
subsistait, le titre d’empereur, le consulat et le sénat brillèrent
comme le soleil, la lune et les étoiles. L’histoire de leur décadence
et de leur chute arrive jusqu’au moment où les deux premiers
[l’empereur et le consulat] ‘s’éteignirent’, en référence à Rome et à
l’Italie, qui durant si longtemps avaient été la première des villes
et le premier des pays; et finalement, quand la quatrième trompette
s’achève, nous voyons ‘l’extinction de cette illustre assemblée’, le
sénat romain. La ville qui avait régit le monde fut, comme une
moquerie infligée à la grandeur humaine, conquise par l’eunuque
Narsès, successeur de Bélisaire. Il mit les Goths en déroute (552* ),
réussit la ‘conquête de Rome’, et le sort du sénat fut scellé. »
E. B. Elliott parle, comme suit, de l’accomplissement de cette partie
de la prophétie dans l’extinction de l’empire d’Occident :
« Ainsi, fut préparée la catastrophe finale, par laquelle, les
empereurs occidentaux et leur empire devaient s’éteindre. Il y avait
longtemps que la gloire de Rome faisait défaut; leurs provinces leur
avaient été arrachées les unes après les autres; le territoire qui
leur restait encore était devenu désert; et leurs possessions
maritimes, leurs flottes et leur commerce avaient été anéantis. Il
leur restait peu de chose en dehors des titres vains et des insignes
de la souveraineté. Et maintenant, le moment était venu, où même
ceux-ci allaient leur être enlevés. Quelque vingt ans après la mort
d’Attila, et beaucoup moins depuis la mort de Genséric (qui avait
visité et mis à sac, peu de temps avant sa mort, la ville éternelle
dans une de ses expéditions maritime, et avait préparé ainsi un peu
plus le chemin de la consommation à venir), plus ou moins à cette
époque, dis-je, Odoacre, chef des Hérules, un reste barbare de l’armée
d’Attila laissé aux frontières alpines d’Italie, s’interposa avec
l’ordre que le nom et la charge d’empereur romain d’Occident soient
abolis. Les autorités s’inclinèrent devant lui en signe de soumission.
Le dernier fantôme d’un empereur -- dont le nom, Romulus Augustule, se
prêtait singulièrement pour qu’un esprit réfléchi mette en contraste
les gloires passées de Rome et sa dégradation présente -- abdiqua; le
sénat remit les insignes impériaux à Constantinople, et déclara à
l’empereur d’Orient qu’un empereur suffisait pour tout l’empire. C’est
ainsi que la troisième partie du soleil impérial fut éclipsée, celle
qui appartenait à l’empire d’Occident, et il ne resplendissait déjà
plus. Je dis qu’un tiers de ce monde appartenait à l’empire
occidental, parce que la fraction apocalyptique est littéralement
exacte. Dans le dernier arrangement entre les deux cours [orientale et
occidentale], tout le tiers de l’Illyrie avait été transféré à la
division orientale. De façon qu’en Occident ‘l’extinction de l’empire’
avait eu lieu; la nuit était venue.
« Malgré cela, il faut se rappeler que l’autorité du nom romain
n’avait pas cessé complètement. Le sénat de Rome continuait à se
réunir comme d’habitude. Les consuls étaient nommés chaque année, un
par l’empereur oriental, et l’autre par l’Italie et Rome. Odoacre
lui-même gouverna l’Italie sous un titre (celui de patrice) que lui
conféra l’empereur d’Orient. Quant à ce qui se réfère aux provinces
occidentales les plus éloignées, ou du moins les territoires les plus
considérables parmi eux, le lien qui les unissait à l’empire romain ne
fut pas coupé totalement. Il existait toujours une certaine
reconnaissance, bien que faible, de l’autorité suprême impériale. La
lune et les étoiles paraissaient réfléchir encore une faible lumière
en Occident. Mais, avec le passage des événements qui se succédèrent
rapidement pendant le demi siècle suivant, elles aussi s’éteignirent.
Théodoric l’Ostrogoth, après avoir détruit les Hérules et leur royaume
de Rome et Ravenne, régna en Italie de 493 à 526 en tant que souverain
indépendant; et après la conquête d’Italie par Bélisaire et Narsès,
quand ils vainquirent les Ostrogoths (conquête précédée de guerres et
de désolations qui laissèrent le pays presque désert, surtout la ville
au sept collines), le sénat romain fut dissout et le consulat abrogé.
De plus, les princes barbares des provinces occidentales, leur
indépendance du pouvoir impérial s’affermissait et était comprise plus
distinctement. Après un siècle et demi de calamités presque sans
pareil dans l’histoire des nations, comme l’indique correctement le
Dr. Robertson, la déclaration de Jérôme, presque calquée de l’image
apocalyptique, mais prononcée prématurément quand Alaric prit Rome
pour la première fois, peut être finalement considérée comme
accomplie. : ‘Calrissimum terrarum lumen extinctum est,’ ‘Le soleil
glorieux du monde s’est éteint’; ou comme l’a exprimé le poète
moderne, toujours sous l’influence des images apocalyptiques ‘Étoile
par Étoile, je vis expirer leur gloire,’ jusqu’à ce qu’il ne reste pas
même une étoile qui scintille dans la nuit obscure et vide. »
Les effrayants ravages commis par ces hordes barbares, sous leurs
chefs courageux mais cruels et acharnés, dévastèrent Rome. Cependant,
les calamités que souffrit l’empire sous les premières incursions de
ces barbares furent légères en comparaison de celles qui allaient
suivre. Elles n’étaient que les gouttes préliminaires d’une pluie
torrentielle qui allait bientôt tomber sur le monde romain. Les trois
trompettes qui restaient arrivaient couvertes d’un nuage de disgrâce,
selon ce qui est indiqué dans les versets suivants.
13 : « Je regardai, et j’entendis un aigle qui volait par le
milieu du ciel, disant d’une voix forte : Malheur, malheur, malheur
aux habitants de la terre, à cause des autres sons de la trompette des
trois anges qui vont sonner! »
Cet ange n’appartient pas à la série des sept qui ont les trompettes,
mais il est simplement un autre messager céleste chargé de proclamer
que les trois trompettes restantes annoncent des malheurs dus aux
événements les plus terribles qui doivent se produire pendant qu’elles
jouent. De manière que la trompette suivante, ou cinquième, est le
premier malheur : la sixième, le second malheur; la septième, la
dernière des trompettes, est le troisième malheur.