On distinguait l'apôtre Jean parmi ses frères comme étant « le
disciple que Jésus aimait ». Nullement craintif, faible ou vacillant
de caractère, il possédait un tempérament aimable et un coeur tendre,
aimant. Il semble avoir apprécié d'une manière particulière l'amitié
du Christ, bénéficiant à plusieurs reprises de marques de confiance et
d'amour de la part du Sauveur. Il fut l'un des trois auxquels il fut
permis d'être témoins de la gloire du Christ sur la montagne de la
transfiguration et de Son agonie à Gethsémané; enfin c'est aux tendres
soins de Jean que notre Seigneur confia Sa mère au cours de Ses
dernières heures d'agonie sur la croix.
L'affection du Sauveur pour le disciple bien-aimé lui était rendue
avec toute la force d'une dévotion ardente. Jean s'attacha au Christ
comme la vigne s'attache au noble tuteur. Pour le bénéfice de son
Maître, il brava les dangers de la salle du tribunal et s'attarda
autour de la croix; lorsqu'il apprit la nouvelle de la résurrection du
Christ, il partit en hâte vers le sépulcre, dépassant même dans son
zèle le fougueux Pierre.
L'amour de Jean pour son Maître n'était pas une simple amitié humaine,
mais c'était l'amour d'un pécheur repentant, conscient d'avoir été
racheté par le précieux sang du Christ. Il estimait comme le plus
grand des honneurs de travailler et de souffrir au service de son
Seigneur. Son amour pour Jésus le poussait à aimer tous ceux pour
lesquels le Christ est mort. Sa religion était d'un caractère
pratique. Il raisonnait que l'amour pour Dieu devait logiquement se
manifester en amour pour Ses enfants. On pouvait l'entendre dire et
redire : « Bien-aimés, si Dieu nous a aimés, nous devons nous aimer
les uns les autres. » (
1 Jean 4.11
). « Nous l'aimons, parce qu'il nous a aimés le premier. Si quelqu'un
dit : J'aime Dieu, et qu'il haïsse son frère, c'est un menteur; car
celui qui n'aime pas son frère qu'il a vu, comment peut-il aimer Dieu
qu'il n'a pas vu? » (
1 Jean 4.19-20
). La vie de l'apôtre était en harmonie avec ses enseignements.
L'amour qui brûlait dans son coeur pour le Christ l'amena à déployer
les plus grands et les plus sincères efforts en faveur de son prochain
et tout spécialement de ses frères de l'Église chrétienne. C'était un
prédicateur puissant, fervent et profondément sincère, et ses paroles
possédaient une grande force de conviction.
UNE NOUVELLE CRÉATURE PAR LA GRÂCE
L'amour confiant et la dévotion désintéressée manifestés dans la vie
et le caractère de Jean présentent des leçons d'une valeur
inexprimable pour l'Église chrétienne. Certains peuvent se l'imaginer
comme possédant naturellement cet amour indépendamment de la grâce
divine; mais Jean avait par nature de sérieux défauts de caractère; il
était orgueilleux, ambitieux et prompt à réagir face au mépris et à
l'injure.
L'affection fervente et profonde de Jean pour son Maître n'était pas
la raison pour laquelle le Sauveur l'aimait, mais l'effet de cet
amour. Jean désirait ressembler à Jésus et sous l'influence
transformatrice de l'amour du Christ, il devint doux et humble de
coeur. Son ego était caché en Jésus. Il était étroitement uni au Cep
vivant et devint ainsi participant de la nature divine. Tel sera
toujours le résultat de la communion avec le Christ. Voilà la
véritable sanctification!
Des défauts marqués peuvent exister dans le caractère d'un individu;
mais lorsqu'il devient un fidèle disciple de Jésus, la puissance de la
grâce divine fait de lui une nouvelle créature. L'amour du Christ le
transforme, le sanctifie. Mais quand certaines personnes professent
être chrétiennes et que leur religion ne fait pas d'elles de meilleurs
hommes et de meilleures femmes dans toutes leurs relations de vivants
représentants du Christ sur le plan des dispositions et du caractère
elles ne Lui appartiennent pas.
L'ÉDIFICATION DU CARACTÈRE
À un moment donné, Jean s'engagea dans une dispute avec quelques-uns
de ses frères à savoir lequel d'entre eux devait être considéré comme
le plus grand. Ils n'avaient pas l'intention que leurs paroles
atteignent l'oreille du Maître; mais Jésus lut dans leurs coeurs et
profita de l'occasion pour donner à Ses disciples une leçon
d'humilité. Il ne le ferait pas seulement pour le petit groupe qui
écoutait Ses paroles, mais pour le bénéfice de tous Ses disciples,
jusqu'à la fin des temps. « Alors il s'assit, appela les douze, et
leur dit : Si quelqu'un veut être le premier, il sera le dernier de
tous et le serviteur de tous. » (
Marc 9.35 ).
Ceux qui possèdent la pensée du Christ n'auront aucune ambition
d'occuper une position plus élevée que leurs frères. Ce sont ceux qui
sont petits à leurs propres yeux qui sont considérés comme grands aux
yeux de Dieu. « Et il prit un petit enfant, le plaça au milieu d'eux,
et, l'ayant pris dans ses bras, il leur dit : Quiconque reçoit en mon
nom un de ces petits enfants me reçoit moi-même; et quiconque me
reçoit reçoit, non pas moi, mais celui qui m'a envoyé. » (
Marc 9.36-37 ).
Quelle précieuse leçon pour tout disciple du Christ! Ceux qui omettent
de s'occuper des devoirs quotidiens qui se présentent sur leur route,
qui négligent la miséricorde et la bonté, la courtoisie et l'amour,
même envers un petit enfant, négligent le Christ Lui-même. Jean sentit
l'importance de cette leçon et en bénéficia.
À une autre occasion, son frère Jacques et lui aperçurent un homme
chassant des démons au nom de Jésus; comme il ne se joignait pas
immédiatement à eux, ils décidèrent qu'il n'avait aucun droit de faire
cette oeuvre et par conséquent le lui défendirent. Avec un coeur
sincère, Jean en relata les circonstances à son Maître. « Ne l'en
empêchez pas, dit Jésus; car il n'est personne qui, faisant un miracle
en mon nom, puisse aussitôt après parler mal de moi. Car celui qui
n'est pas contre nous est pour nous. » (
Marc 9.39-40 ).
Une autre fois, Jacques et Jean Lui présentèrent une requête par
[l'entremise de] leur mère afin d'obtenir la permission d'occuper les
positions d'honneur les plus élevées dans le royaume du Christ. Le
Sauveur répondit : « Vous ne savez ce que vous demandez. » (
Marc 10.38
). Comme il y en a beaucoup parmi nous qui comprenons peu la véritable
portée de nos prières! Jésus connaissait le prix de la gloire que le
sacrifice infini devait acheter lorsque, « en vue de la joie qui lui
était réservée, [Il] a souffert la croix et méprisé la honte » (
Hébreux 12.2
). Cette joie était celle de voir des âmes sauvées par Son
humiliation, Son agonie et Son sang versé.
C'était là la gloire que le Christ devait [Lui-même] recevoir et que
ces deux disciples avaient demandé de pouvoir se partager. Jésus leur
demanda : « Pouvez-vous boire la coupe que je dois boire, ou être
baptisés du baptême dont je dois être baptisé? Nous le pouvons,
dirent-ils. » (
Marc 10.38-39 ).
Comme ils comprenaient peu ce que signifiait le baptême! « Jésus leur
répondit : Vous boirez en effet la coupe que je dois boire et vous
serez baptisés du baptême dont je suis baptisé; mais pour ce qui est
d'être assis à ma droite ou à ma gauche, cela ne dépend pas de moi,
et ne sera donné qu'à ceux pour lesquels cela est préparé. » (
Marc 10.39-40 ).
ORGUEIL ET AMBITION RÉPRIMANDÉS
Jésus comprit les motifs inspirant leur requête et Il réprouva
l'orgueil et l'ambition des deux disciples : « Vous savez que ceux
qu'on regarde comme les chefs des nations les tyrannisent, et que les
grands les dominent. Qu'il n'en soit pas ainsi parmi vous! Mais
quiconque veut être grand parmi vous, qu'il soit votre serviteur; et
quiconque veut être le premier parmi vous, qu'il soit l'esclave de
tous. Car le Fils de l'homme est venu, non pour être servi, mais pour
servir et donner sa vie en rançon de plusieurs. » (
Marc 10.42-45 ).
À une occasion, le Christ envoya des messagers devant Lui dans un
village des Samaritains, demandant aux gens de préparer des
rafraîchissements pour Ses disciples et pour Lui. Mais lorsque le
Sauveur s'approcha du village, Il parut passer outre en direction de
Jérusalem. Ceci souleva l'inimitié des Samaritains qui, au lieu
d'envoyer des messagers pour L'inviter et même Le presser de rester
avec eux, négligèrent les marques de courtoisie qu'ils auraient
données à un voyageur ordinaire. Jésus n'impose jamais Sa présence à
personne et les Samaritains perdirent la bénédiction qui leur aurait
été accordée s'ils L'avaient prié d'accepter leur invitation.
Nous pouvons nous étonner devant cette façon impolie de traiter la
Majesté du ciel, mais combien souvent ceux qui prétendent être Ses
disciples se rendent coupables d'une négligence semblable. Prions-nous
Jésus avec instance de venir habiter dans nos coeurs et dans nos
maisons? Il est rempli d'amour, de grâce, de bénédictions, et Il se
tient prêt à nous accorder ces dons; mais comme les Samaritains, nous
sommes souvent satisfaits sans ces choses.
Les disciples étaient au courant de l'objectif du Christ de bénir les
Samaritains de Sa présence; lorsqu'ils virent la froideur, la jalousie
et le manque de respect démontrés envers leur Maître, ils furent
remplis d'étonnement et d'indignation. Jacques et Jean furent
particulièrement touchés. Que Celui qu'ils révéraient tellement soit
ainsi traité semblait pour eux un crime trop grand pour être ignoré
sans encourir une punition immédiate! Ils dirent dans leur zèle :
« Seigneur, veux-tu que nous commandions que le feu descende du ciel
et les consume, comme Élie l'a fait? » (
Luc 9.54
), faisant allusion à la destruction des capitaines syriens et de
leurs compagnies envoyés pour capturer le prophète Élie.
Jésus réprimanda Ses disciples en disant : « Vous ne savez de quel
esprit vous êtes animés. Car le Fils de l'homme n'est pas venu pour
détruire les vies des hommes mais pour les sauver. » (
Luc 9.55-56
). Jean et ses confrères fréquentaient une école dont le professeur
était le Christ. Ceux qui étaient prêts à voir leurs propres défauts
et anxieux d'améliorer leur caractère, en avaient l'ample opportunité.
Jean se saisissait de chaque leçon comme d'un trésor et cherchait
constamment à mettre sa vie en harmonie avec le modèle divin. Les
leçons de Jésus, présentant la simplicité, l'humilité et l'amour comme
essentiels pour croître en grâce et se préparer pour son oeuvre,
étaient de la plus grande valeur pour Jean. Ces leçons nous sont
adressées en tant qu'individus et frères dans l'Église, aussi bien
qu'aux premiers disciples du Christ.
JEAN ET JUDAS
Nous pouvons tirer une leçon instructive du contraste frappant entre
le caractère de Jean et celui de Judas. Jean était une illustration
vivante de la sanctification. D'un autre côté, Judas possédait une
piété formaliste et son caractère était plus satanique que divin. Il
professait être disciple du Christ mais Le reniait dans ses paroles et
dans ses oeuvres.
Judas eut les mêmes occasions précieuses que Jean d'étudier et
d'imiter le Modèle. Il écouta les leçons du Christ et son caractère
aurait pu être transformé par la grâce divine. Mais tandis que Jean
luttait avec sincérité contre ses propres défauts et cherchait à
ressembler au Christ, Judas violait sa propre conscience, cédant à la
tentation et formant des habitudes de malhonnêteté qui le
transformeraient à l'image de Satan.
Ces deux disciples représentent le monde chrétien. Tous professent
être disciples du Christ; mais alors qu'une classe marche dans
l'humilité et la simplicité et apprend de Jésus, les autres montrent
qu'ils ne mettent pas en pratique la parole mais qu'ils n'en sont que
les auditeurs. Une classe est sanctifiée par la vérité; l'autre ne
connaît rien de la puissance transformatrice de la grâce divine. Ceux
qui appartiennent à la première meurent quotidiennement au moi et
triomphent du péché. Ceux de la seconde classe s'abandonnent à leurs
propres convoitises et deviennent les serviteurs de Satan.